C’est le monde à l’envers. Décriés par les écologistes depuis des années, les SUV neufs généreraient moins de CO2 que les citadines actuelles. Mais la vérité est un peu plus compliquée que ça…
Les écologistes détestent les SUV. Et pour cause : ces machines hautes sur pattes, pénalisées aérodynamiquement et plus lourdes que les voitures normales, consomment plus de carburant. Selon une étude de Jato Dynamics en 2021, on estime qu’un SUV émet environ 18CO2 de plus qu’une berline comparable. Il y a quelques années, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) attribuait même l’essor des SUV sur tous les marchés mondiaux à la deuxième plus forte augmentation des émissions de CO2 au monde. Dans ce contexte, comment peut-on dire que les SUV peuvent réduire ces émissions de CO2 sur le Vieux Continent ?
Pour comprendre cette étrange affirmation, il faut étudier en détail les chiffres de Jato Dynamics sur l’évolution des émissions de CO2 automobile en Europe. L’organisation détaille les émissions de CO2 par type de voiture. Pas étonnant que les SUV (qui représentent désormais 45 % du marché automobile total en Europe !) aient les pires émissions moyennes de CO2. Les SUV vendus en Europe en 2021 émettront en effet en moyenne 107,9 g/km de CO2, contre 97,7 g/km de CO2 pour les voitures compactes et 76,9 g/km de CO2 pour les compactes avec citadine. En moyenne, ces SUV génèrent 13 pourcent de CO2 de plus que les voitures à carrosserie plus traditionnelle. Mais les experts de Jato notent un autre phénomène : l’an dernier, 35 des 85 voitures 100 % électriques disponibles sur le marché automobile européen étaient des SUV. De ce fait, ces SUV ont couvert 41% du marché des véhicules électriques contre 24% en 2019. A cela s’ajoute la forte croissance de la technologie hybride rechargeable dans les SUV, qui restent fortement plébiscités par le processus de certification WLTP face à un moteur thermique propriétaire, et vous obtenez des statistiques étonnantes du tableau ci-dessous : en 2021, de nouveaux SUV familiaux de taille moyenne sont mis en vente en Europe (Audi Q5, BMW, X3, Peugeot 5008…) génèrent moins de CO2 en moyenne qu’en ville voiture avec 65,4 g/km de CO2 contre 76,9 g/km pour la seconde !
Alors comment arriver à un tel résultat ? Pour une raison très simple : les SUV sont les véhicules les plus consommés et les plus polluants. De ce fait, les constructeurs automobiles ont dû s’adapter ces dernières années à des normes européennes très exigeantes en électrifiant massivement ces véhicules. Vendus à une moyenne de plus en plus chère, ces SUV peuvent en tout cas s’offrir les très chères motorisations 100% électriques et hybrides rechargeables. C’est tout simplement le seul moyen de continuer à les vendre pour répondre à la demande croissante de VUS. Même si elles sont également électrifiées, les petites voitures sont plus susceptibles de maintenir des groupes motopropulseurs thermiques bas afin de rester économiquement attractives. En revanche, les modèles de luxe vendus au goutte-à-goutte ont pour l’instant conservé leurs puissants moteurs à gros pistons, même s’ils commencent également à augmenter sensiblement la part de marché des nouvelles versions hybrides et électriques.
Jato a constaté que les SUV ont davantage réduit leurs émissions de CO2 d’ici 2021 que toutes les autres voitures. Mais cela ne rend pas ces modèles plus précieux sur le plan écologique par rapport aux véhicules plus traditionnels de la taille d’une carrosserie (berlines, compactes et scooters). Et rappelez-vous que Jato agrège uniquement les données de CO2 liées aux émissions des voitures pendant la conduite. Cependant, un SUV électrique génère également du CO2 et de la pollution en raison de la production importante de batteries. Sans parler de la problématique des SUV hybrides rechargeables utilisés hors fenêtre de performances et des chiffres de similarité WLTP, ils deviennent vite aussi gourmands que les modèles thermiques…